Et si l’argent du foot allait à la recherche scientifique?

Football Maroc

Ceux qui me connaissent bien, savent à quel point je suis allergique et ignorant dans le domaine du foot. Un exemple simple pour l’illustrer. Il y a quelques semaines, des amis discutaient devant moi du transfert d’un certain Ronaldo. J’étais un petit peu étonné, car le Ronaldo que je connais était devenu quelque peu âgé, après avoir remporté les Coupes du Monde en 1994 et 2002 et avoir perdu celle de 1998. Sauf que j’apprenais, à ma grande stupeur, qu’il existait un homonyme qui était plutôt de nationalité portugaise et que tous les clubs rêvaient d’avoir dans leurs rangs. C’est vous dire que je suis vraiment un cas désespéré dans ce domaine…

Mais quand j’ai entendu qu’un fonds spécial (encore un…), doté de 250 millions de DH, allait être créé pour soutenir le foot au Maroc, je me suis posé beaucoup de questions, et je me suis intéressé de près au sujet.

J’ai appris entre autres, que le sélectionneur national, M. Roger Lemerre, gagnait 37500 Euros par mois (en devises bien sûr), et que pour rompre le contrat prématurément, la Fédération devrait verser 20 millions de DH d’indemnités.

J’apprends par même occasion que les stades en construction à Tanger et Marrakech vont coûter respectivement 850 millions et 1 milliard de DH au contribuable. Au total, une enveloppe budgétaire de 4,6 milliards de DH a été allouée à la construction de nouveaux stades au Maroc.

Dans un pays, où 15% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, où 40% de la population est analphabète, et où le taux de chômage est de 10% (officiellement, mais tout le monde sais qu’il est beaucoup plus élevé…), cet argent ne pouvait-il pas servir à autre chose?

La MAP nous apprend que le football au Maroc est “un facteur de cohésion sociale, de convivialité et d’unité autour des valeurs marocaines”. Au point d’y consacrer des milliards de DH, pour les résultats que l’on connait? N’y a-t-il pas d’autres domaines ou valeurs qui réunissent les marocains?

Les pays qui planifient leur avenir à long terme, pensent plutôt à investir dans la recherche scientifique, dans l’éducation de leurs enfants… Le sport est très important dans le développement des sociétés, c’est indéniable. Mais au point d’y consacrer des sommes aussi conséquentes, dans un pays qui en a besoin ailleurs, et où on des gens meurent encore de froid?

Le financement du sport devrait plutôt se faire à un niveau beaucoup plus bas : construire des équipements sportifs de proximité, encourager la pratique du sport pour toutes les tranches d’âges, promouvoir le sport universitaire (autre que les courses à pied et le foot!). Laissons les clubs se financer par du sponsoring (ils se débrouillent bien, non?).

Quand je lis qu’en 2009, 69 millions de DH ont été consacrés à l’investissement dans la recherche scientifique, et que d’un autre coté, 250 millions de DH sont consacrés au foot, je suis pronfondément choqué. Et pas du tout rassuré pour l’avenir de mon pays.

Islande : Terre de feu, de glace et de banqueroute

Il y a de ces pays dont le charme et la beauté ne peuvent pas laisser indifférent. A la première occasion offerte de visiter l’Islande, je n’ai pas hésité un seul instant. Je rêvais depuis longtemps de visiter cette terre de miracles géologiques, et d’admirer le beau soleil de minuit. J’ai donc acheté mon billet d’avion 4 jours avant le départ, et pour donner plus de charme à ce séjour d’une semaine, je n’ai absolument rien préparé, mis à part l’achat d’un Guide du Routard pour l’Islande. Les meilleurs voyages sont ceux que l’on prépare le moins!

Une fois arrivé à Reykjavik, je découvre une capitale qui n’en donne vraiment pas l’air. Très peu de circulation, même en heures de pointe, des bâtiments pas plus hauts que 3 étages, des lacs et des espaces verts partout, et aucune trace de pauvreté ou de quartier défavorisé! Bienvenue dans la capitale la plus paisible du Monde!

Mais on fait vite le tour des attractions touristiques et des musées, et on décide de louer une voiture pour faire le tour d’Islande en 5 jours. Le pays est connu pour ses merveilles géologiques, et ses paysages à couper le souffle. Il faut très vite sortir de la capitale pour découvrir ces merveilles. Et je ne fut pas déçu.

En 2000 Km de route, on a pu voir des fjords, des volcans (actifs et inactifs), des lacs volcaniques, de la lave pétrifiée, des glaciers, un lac parsemé de glace, des lacs bleus naturellement chauffés, des geyser, des sources d’eau chaude, des cheminées volcaniques, de la boue bouillante, des cascades vertigineuses … Bref, tout ce qui peut rappeler la vraie place de l’Homme sur cette Terre : On n’est que très peu de choses face à ces forces de la nature.

L’Islande est un pays aussi grand que la Corée du Sud, mais beaucoup moins peuplé : 300 000 islandais, contre 50 millions de Sud Coréens! 70% des habitants sont concentrés autour de la capitale, ce qui laisse quasi-désertes des régions entières du pays. Le développement économique de l’Islande est intéressant à étudier. Le pays a le ratio PIB/habitant le plus élevé au Monde (chiffres de 2007), et 70% du PIB du pays proviennent de la pêche et de l’élevage. Au début des années 90, le pays a décidé d’évoluer directement vers une économie de services, sans passer par une étape d’industrialisation. Le secteur financier a donc fortement émergé, et a conduit les financiers à développer des produits de plus en plus sophistiqués, sans vraiment en mesurer les risques. Un des exemples de ces produits, qui a conduit le pays directement à la faillite en 2008, est celui des emprunts immobiliers libellés en Yen japonais. Durant une dizaine d’années, les taux d’intérêt au Japon ont été très bas (de l’ordre de 1%). Les financiers islandais ont voulu profiter de ces taux avantageux, et proposer aux ménages islandais de souscrire à des emprunts immobiliers en Yen. Le seul risque que supporteraient les ménages, serait le risque de fluctuation des taux de change entre la couronne islandaise et le Yen japonais. Les banquiers avaient sous-estimés ce risque, et croyaient que la couronne islandaise pouvait résister à tous types de crises et de fluctuations. Les marchés de change leur ont donné tort. La monnaie islandaise a perdu 60% de sa valeur en l’automne 2008, ce qui a conduit à une explosion des traites mensuelles des ménages islandais. Beaucoup sont devenus incapables de payer, et les banques se sont retrouvées en faillite. L’Etat a été obligé de racheter 3 des plus grandes banques du pays, pour éviter un effondrement total de l’économie, et a dû accepter une aide du FMI et d’autres pays européens (y compris de la Pologne!).  En quelques mois, l’Islande est passée du statut d’un pays prospère, au statut de nation au bord de la faillite.

Mais malgré tout, les islandais gardent le moral, et ont confiance en l’avenir. Fiers de leur pays, jamais vous n’entendrez un islandais se plaindre de la situation (et surtout pas devant un étranger), et restent très confiants quant à la capacité du pays à s’en sortir. Après tout, ils survivent bien à un hiver où ils ne voient la lumière du jour que pendant 2 à 3 heures quotidiennement 🙂

PS : N’hésitez pas à me contacter pour plus de renseignements sur le voyage, ou pour obtenir une des photos du slideshow en haut en taille originale.

Victoire électorale du parti de l’ami du Roi

Elections Maroc

Source : L’Express

Le Front de la Défense des Institutions Démocratiques (FDIC), créé il y a un an, et dirigé par M. Ahmed Réda Guedira, ami proche du Roi, a gagné les élections de 1963, en obtenant la majorité des sièges au cours d’élections qui se sont tenues ce vendredi sur tout le territoire marocain. Le FDIC auquel se sont ralliés plusieurs membres d’autres partis politiques à la veille des élections, a pour programme électoral le renforcement du processus démocratique, et l’application d’un ensemble de réformes économiques visant à promouvoir l’emploi et à la création de richesses qui bénéficieraient à tous les citoyens marocains. Le FDIC est donc déclaré grand gagnant de ces élections face aux socialistes et à l’Istiqlal. Le Ministère de l’Intérieur a déclaré que les élections se sont passées dans d’excellentes conditions, et sans incident notoire. Les partis de l’opposition ont réclamé l’ouverture d’enquêtes, suite à des cas de fraude. Le procureur du Roi a décidé l’ouverture d’une information judiciaire établir la véracité de ces propos.

Vous voulez jouer à une petit jeu? Remplacez FDIC par PAM, 1963 par 2009, Réda Guedira par Fouad Ali El Himma, et le tour est joué. L’Histoire n’est-elle pas un éternel recommancement? Vous n’y comprenez rien? C’est pas grave. Personne ne sait comment un parti vieux d’un an a pu couvrir 60% des circonscriptions, et comment ils ont pu gagner 20% des sièges… Tout ce qu’on sait, c’est que le PAM s’est défini dans les milieux ruraux et péri-urbains, comme le parti du Roi. Et comme personne ne veut être contre le Roi, les électeurs votent forcément PAM…

Le PAM a voulu être le trublion du paysage politique marocain, et c’est bien réussi. Reste à connaître maintenant leur plan pour les années à venir. Les élections législatives de 2012? On applique la même recette, et c’est dans la poche.

Tout ce que j’espère maintenant, c’est que les livres d’histoire ne parleront pas un jour d’un “printemps marocain” qui aura duré 10 ans.

Pour le reste, circulez, il n’y a rien à voir. Et rendez-vous dans 20, 30 ou 40 ans. Peut-être…

De la Chabatisation de la vie politique au Maroc

Elections au Maroc

En cette période de campagne électorale pour les élections municipales, où les idées et les programmes devraient s’affronter, on assiste encore une fois à un débat (voire à un combat) de très bas niveau. On est devenus habitués à des politiciens à la limite du “voyoutisme”, et qui forgent à coup de déclarations incendiaires, de mercenaires payés à l’heure, ou d’actes politiques spectaculaires à la limite du ridicule, une réputation de héros des temps modernes, dans un monde ou l’élite politique est en proie à la déchéance. Les prédicateurs de ce “courant” sont connus et reconnus. Ils jouissent d’une aura locale, souvent issue d’affaires juteuses, de milices de mercenaires bien connues des habitants de ces villes, et d’une soif de pouvoir sans commune mesure.

J’ai pu voter pour la première fois lors des élections municipales de 2003. C’étaient les premières élections municipales organisées sous le nouveau règne, et on nous promettait les élections les plus transparentes de l’histoire du Maroc. Ce qui revient à dire que la voix des citoyens sera respectée à la lettre. A l’issue du scrutin, les observateurs étaient unanimes à dire que les élections étaient effectivement libres et démocratiques. Sauf que les magouilles se sont passées ailleurs : lors de la constitution des Conseils des villes. A Rabat par exemple, l’USFP était classé premier, mais n’avait pas de majorité absolue pour gouverner la ville. Il devait donc s’allier avec d’autres partis pour constituer une majorité. Sauf que TOUS les autres partis politiques (mis à part le PPS) se sont alliés  pour constituer une majorité. Rabat s’est donc retrouvée gérée par une coalition de MP-Istiqlal-PJD. Une chimère politique qui ne ressemble à rien… Résultat, la gestion de la ville est catastrophique, et un rapport de la Cour des Comptes est accablant pour le maire Bahraoui. Le rapport relève, entre autres, que le conseil de la ville a créé 700 emplois fictifs!

A Fès, la gestion de la ville par M. Chabat n’a guère été meilleure. Il a également été accablé pour mauvaise gestion par la Cour des Comptes. Des dépenses non justifiées de 2 milliards de DH ont été constatées par la Cour! Non M. Chabat, il ne suffit pas de couvrir la ville de fontaines pour dire que la gestion a été exemplaire! Le désormais spécialiste des boutades à la marocaine, jouit d’une aura sans précédent. Ses sorties médiatiques lui ont valu d’être constamment à la Une ces dernières semaines, et le débat politique sincère en souffre beaucoup. Une vidéo qui a beaucoup circulé sur Internet suffira à vous convaincre que ce monsieur ne fait qu’assurer le spectacle à défaut d’autre chose.

Supposons que ce monsieur devienne un jour Secrétaire Général de l’Istiqlal, et que celui-ci gagne les élections. Supposons également que la logique démocratique soit appliquée à la lettre. Il devrait donc logiquement être désigné comme Premier Ministre. Qu’aura-t-on à faire? Moi en tout cas, j’ai déjà choisi un endroit paisible pour un exil volontaire : L’île des Sanafir (si, si, ça existe!). En espérant qu’il n’y ait pas de Sanfour Chabat parmi la population indigène de l’île…

Mais le véritable phénomène cette année, est incontestablement le PAM. Ce parti sorti de nul part (enfin si quand même…), et qui réussit, après moins d’un an d’existence à couvrir 60% des circonscriptions, devançant l’Istiqlal du haut de ses 66 ans d’existence. Comment peut-on réussir une telle “performance” sans attirer les opportunistes et les arrivistes de tout bord. Que peut-on espérer des élus d’un parti qui dénonce l’application de la Loi? La question à se poser maintenant : quels sont les plans du Makhzen autour du PAM. Personne aujourd’hui ne peut se vanter d’avoir une réponse à cette question, tellement les enjeux sont flous, et les évènements de plus en plus incohérents et imprévisibles. Les secrets du Makhzen sont encore une fois impénétrables…

Que faire alors le 12 Juin? Voter en espérant influer un tout petit peu sur le cours des choses, ou s’abstenir et laisser les vendeurs de voix faire leur marché, et récupérer l’autre paire de babouche tant convoitée, ou l’autre moitié de la coupure de billet de 200 DH? Un avis très personnel me pousse tout de même à préférer la première solution. Si on ne veut pas voter pour un programme ou une personne en particulier, on peut tout de même faire son choix pour le moins mauvais des candidats, ne serait que pour barrer la route à ces voyous qui nous pourissent tant la vie…

Microfinance au Maroc : Quelles perspectives de développement?

Microfinance au Maroc

Il y a quelques mois, je devais choisir un sujet pour mon mémoire de recherche académique, étape indispensable pour l’obtention de mon diplôme. L’exercice est souvent douloureux, vus les vastes domaines proposés par l’école, et que le choix du sujet doit traiter d’une problématique précise et pertinente. Mon choix s’est vite orienté vers la microfinance, mais sous quel angle le traiter?

Je suis tombé sur un classement des institutions de microfinance (IMF) réalisé par le magazine Forbes. Et à mon grand étonnement, trois IMF marocaines étaient classées dans le Top 12 mondial! Pour une fois que ce n’était pas la MAP qui nous l’annonçait! J’ai poussé mes investigations, et j’ai constaté que dans de très nombreux rapports internationaux, l’expérience marocaine en microfinance (qui a une quinzaine d’années) est citée comme exemple de développement. Mais le secteur connaissait quelques problèmes de développement liés à divers facteurs, mais qui étaient communs à plusieurs expériences dans différents pays. Mon choix a donc été de traiter des perspectives de développement de la microfinance au Maroc.

J’ai donc entrepris des contacts avec des IMF marocaines, et j’ai pu aller sur le terrain avec des agents du microcrédit pour constater de fait ce qui se faisait sur le terrain, et comprendre les attentes et les motivations des bénéficiaires. J’étais vraiment impressionné de l’étendue de l’organisation et des moyens mis en place par ces associations. Les bénéficiaires étaient demandeurs, qu’ils soient éleveurs, artisans, petits commerçants… Et les chiffres sont là : plus d’un million de bénéficiaires (dont deux tiers de femmes) et 5 milliards de DH d’encours de crédit. Loin d’en faire des riches, le microcrédit permettait surtout à des pauvres de lever la tête, de développer des revenus complémentaires à des activités qu’ils exercent déjà, et d’améliorer leur niveau de vie.

Sauf que la croissance dans le secteur a été tellement rapide entre 2004 et 2007, que des problèmes avaient fini par apparaitre. Le taux de remboursement qui était jusqu’en 2007 de 99%, a brutalement chuté à 95%, et la 2ème IMF au Maroc, Zakoura, a connu de graves problèmes de gestion, ce qui a mené à son absorption par la Fondation de Banque Populaire pour le Microcrédit, pour éviter sa faillite, et une grave crise de confiance dans le secteur.

Ce qui m’a intrigué dans l’expérience de la microfinance au Maroc, c’est que l’État a très peu intervenu dans le développement du secteur. Il n’a fait que ce qu’on lui a demandé, à savoir un cadre légal approprié, qui permet un développement et un fonctionnement transparent. Preuve que la société civile peut beaucoup faire, même en l’absence d’un soutien actif de l’État. Des garde-fous ont été instaurés pour éviter des débordements et des dysfonctionnements, comme ceux observés en Amérique Latine ou en Inde. Compartamos, une des plus grandes IMF au Mexique a été introduite en bourse, et a connu un succès phénoménal. L’IMF était tellement profitable, que la valeur de ses titres se sont envolés en bourse. Et puis c’est bien connu, les pauvres remboursent très bien, et ils sont tellement nombreux, qu’on peut faire beaucoup d’argent sur leur dos. Les IMF au Maroc, de part leurs statuts d’associations, ne sont pas (encore) tombés dans ce piège. Certes, elles aspirent un jour à devenir des banques mutuelles (ou associatives), mais on en est pas encore là. Leurs missions de développement et d’accompagnement social sont étroitement surveillées par des conseils d’administration indépendants. Elles sont même allées jusqu’à baisser leurs taux d’intérêts ces dernières années, ce qui est unique dans le monde!

La microfinance ne peut être en aucun cas LA solution pour sortir des milliers de gens de la pauvreté, mais un des leviers d’accompagnement. Le rôle de l’État reste primordial. Sans investissements massifs dans l’éducation, les infrastructures, la santé, l’habitat social, la pauvreté ne fera qu’augmenter, et l’écart entre les plus riches et les plus pauvres ne pourra qu’exploser.

Pour ceux qui s’intéressent plus au sujet, je mets à votre disposition le mémoire en PDF.

Bonne lecture!